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F.A.Q. : tout savoir sur la jaunisse en cette première campagne sans néonicotinoïdes

En cette première année de semis sans traitements de semences aux néonicotinoïdes, la surveillance et la lutte contre les pucerons vecteurs de la jaunisse sont prioritaires. Cette foire aux questions a été conçue pour répondre aux questions que vous pouvez vous poser sur les virus de la jaunisse, les pucerons vecteurs, la surveillance mise en place par la filière, les moyens de lutte actuellement disponibles et les travaux de recherche en cours.

Qu’est-ce que la jaunisse ?

 

La jaunisse regroupe un complexe de maladies virales :

 

  • La jaunisse modérée, causée principalement par deux virus : le Beet Mild Yellowing Virus (BMYV) et le Beet Chlorosis Virus (BChV).
  • La jaunisse grave, causée par un seul virus : le Beet Yellows Virus (BYV).

 

Au champ, une même plante peut être potentiellement infectée par plusieurs de ces virus en même temps.

 

Laquelle est la plus fréquente au champ ?

 

La jaunisse modérée est la plus fréquente en France, avec des taux de prévalence moyens autour de 90% pour le BChV et de 50% pour le BMYV, alors que la prévalence moyenne de la jaunisse grave (BYV) se situerait autour de 20% (données préliminaires ITB-Tereos).

 

Comment saurais-je si mon champ est infecté par la jaunisse ?

 

Les feuilles infectées par la jaunisse modérée prennent une teinte jaune-orangée. Celles infectées par la jaunisse grave prennent une teinte jaune-citron qui vire peu à peu au rouge-brun. Dans les deux cas, elles s’épaississent et deviennent cassantes. Un champ infecté présentera des ronds de jaunisse répartis aléatoirement en fonction de la dispersion des foyers d’infection. Les symptômes sont généralement bien visibles à partir du mois de juillet.

 

Les autres jaunissements observables (sécheresse, carences physiologiques) ne sont jamais associés à un épaississement des feuilles et apparaissent généralement dans l’ensemble d’un champ, pas sous forme de ronds. Il peut éventuellement y avoir confusion fin juin début juillet avec des feuilles infectées par du mildiou dont les extrémités jaunissent et s’épaississent, mais il ne s’agira que de betteraves isolées.

 

 

 

 

Ronds de jaunisse sur une parcelle non traitée dans le Pas-de-Calais en 2017 (photo drone ITB).

 

Comment la jaunisse est-elle transmise ?

 

Ces trois virus sont tous exclusivement transmis par des pucerons, dits vecteurs. Les pucerons acquièrent le virus en se nourrissant de plantes contaminées et peuvent ensuite infecter de nouvelles plantes.

 

  • Le puceron vert du pêcher, Myzus persicae, est le principal vecteur de la jaunisse, car il a de très bonnes capacités de transmission des virus de la jaunisse modérée comme de celui de la jaunisse grave. Il existe d'autres espèces de pucerons verts vectrices, mais leur pouvoir infectieux est plus faible.
  • Le puceron noir de la fève, Aphis fabae, est un bon vecteur de la jaunisse grave mais un mauvais vecteur de la jaunisse modérée. Ses capacités de multiplication sont bien plus fortes que celles de Myzus persicae et il peut jouer un rôle dans la dissémination des virus au sein des parcelles.

 

La jaunisse n’est jamais transmise à la descendance des pucerons contaminés.

 

 

Individu ailé de Myzus persicae (photo ITB).

 

Comment arrive-t-elle dans les parcelles ?

 

La jaunisse est apportée dans les champs de betterave par les vols de pucerons verts ailés au printemps (Myzus persicae principalement) qui ont pu acquérir le virus sur des hôtes infectés : épinards d’hiver, adventices (mouron blanc, séneçon, capselles, véroniques), betteraves porte-graine, repousses foliaires dans les silos de betteraves fourragères ou encore dans les cordons de déterrage. Ils établissent ainsi des foyers primaires d’infection qui serviront aux générations suivantes de source de virus pour disperser la maladie dans les parcelles.

 

Il n’y a pas de transmission possible par les graines ni mécaniquement de plante à plante.

 

 

Cycle épidémiologique de la jaunisse (schéma ITB-SEDA)

 

Combien de temps un puceron doit-il se nourrir sur une plante avant d’être infectieux ?

 

Cela dépend du type de virus. Pour les virus de la jaunisse modérée (BMYV et BChV), qui sont dits persistants, le temps d’acquisition sur une plante infectée est d’environ 48 à 72h, et le puceron reste infectieux à vie. En revanche, pour le virus de la jaunisse grave (BYV), qui est dit semi-persistant, le temps d’acquisition est plus court, de quelques minutes à plusieurs heures, et le virus est perdu dans les 48h qui suivent.

 

Quel est le temps de latence entre le moment où la plante est infectée et celui où elle exprime des symptômes ?

 

Le temps de latence est en général de 2 à 4 semaines mais serait plus court pour la jaunisse grave (1 à 2 semaines) que pour la jaunisse modérée (4 à 6 semaines). Dans tous les cas, le contrôle des pucerons doit être effectué avant l’apparition des symptômes dans les champs.

 

A quel stade la betterave est-elle la plus sensible au virus ?

 

Le pouvoir multiplicateur des virus est plus élevé chez les jeunes stades des betteraves. Les stades de 2 à 6 feuilles sont donc particulièrement sensibles. La sensibilité diminue ensuite progressivement et lorsque la betterave est adulte, au-delà du stade 12 feuilles, elle est naturellement plus résistante.

 

Quel est le risque de pertes de rendement en cas d’infection ?

 

Selon des études en Angleterre, le BMYV peut provoquer des pertes de rendement jusqu’à 35% dans les zones infectées, et le BYV des pertes jusqu’à 50%.

 

En France, d’après des données ITB récoltées en 2017 dans des champs non protégés et contaminés par le BMYV, les pertes de rendement racine sur la totalité des parcelles allaient de 1 à 11% selon la gravité de l’infection.

 

Suis-je plus ou moins concerné par la jaunisse selon ma région de production ?

 

Oui. La gravité des épidémies de jaunisse dépendant en premier lieu du climat, les régions proches de la bordure maritime (Normandie, Somme, Oise et Nord-Pas-de-Calais) sont les plus à risque. Ceci est confirmé par l’observatoire VIGIBET de l’ITB conduit depuis 2010 sur un réseau d’une trentaine de parcelles non traitées où la fréquence et la gravité de la jaunisse sont notées.

 

 

Gravité de la jaunisse (% de surface touchée) dans le réseau de parcelles Vigibet de 2010 à 2018.

 

Est-ce que les traitements de semences disponibles en 2019 permettront de lutter contre la jaunisse ?

 

Non. Les traitements de semences disponibles en 2019 contiendront un enrobage de téfluthrine, permettant de lutter contre les ravageurs souterrains (taupins, blaniules, atomaires et tipules) mais n’auront aucun impact sur les populations de pucerons vecteurs de jaunisse.

 

Quels sont les insecticides disponibles en pulvérisation pour lutter contre les pucerons ?

 

Le Teppeki (50 % de Flonicamide) est homologué depuis le 21 décembre 2018 avec les conditions d’emploi suivantes :

 

  • Dose d’homologation de 0,14 kg/ha
  • Une application par an à partir du stade 6 feuilles vraies
  • Efficace uniquement sur pucerons (sélectif des auxiliaires)
  • Mélange possible avec les herbicides
  • Rémanence de 2 semaines minimum
  • Ajouter 1L d’huile selon la réglementation

 

Le Movento (Spirotétramate à 100 g/L) a obtenu une AMM dérogatoire de 120 jours depuis le 9 avril 2019 avec les conditions d’emploi suivantes :

 

  • Dose d’homologation de 0,45 L/ha
  • 2 applications par an (intervalle minimum de 14 jours) à partir du stade 2 feuilles jusqu'à couverture des betteraves
  • Efficace uniquement sur pucerons (sélectif des auxiliaires)
  • Ne pas utiliser en mélange car risque de baisse d'efficacité
  • Rémanence de 2 semaines minimum

 

Le Karaté K est également homologué sur betteraves contre les pucerons, mais son utilisation est fortement déconseillée pour cause de phénomènes de résistance et de non sélectivité vis-à-vis des auxiliaires (voir Le Cahier Technique du Betteravier Français n°1090 du 19/03/2019).

 

Comment saurais-je quand traiter mes parcelles ?

 

Un réseau de surveillance et d'alerte pucerons a été mis en place par la filière afin de positionner au mieux le contrôle des pucerons en végétation. L'ITB vous informera tout au long de la campagne sur le risque pucerons dans votre département.

 

Un réseau de capture (par cuvettes jaunes) et d’identification des individus ailés a par ailleurs été mis en place afin d’évaluer la présence d’espèces vectrices dans les parcelles. Des tests virologiques seront également conduits en partenariat avec Syngenta afin de révéler la présence ou l’absence des virus de type BMYV et BYV. Ces données permettront d’ajuster en conséquence l’analyse de risque et le conseil.

 

 

Cuvette jaune dans un champ de betterave dans l'Oise (photo ITB).

 

Comment et quand serais-je informé ?

 

  • Via les notes d’informations régionales, à partir des données d’observations récoltées chaque semaine, et avec les conseils des experts techniques de l’ITB dans votre région. Ces notes seront également accessibles sur le site internet de l’ITB (www.itbfr.org).
  • Via les bulletins de santé du végétal (BSV) diffusés chaque semaine dans votre région.

 

Existe-t-il un modèle permettant de prédire les épidémies de jaunisse ?

 

L’ITB a constitué une base de données historiques regroupant 55 observations sur les dates d’apparitions des pucerons à l’échelle départementale. Ces données sont issues des réseaux de surveillance qui étaient mis en place dans les années 80. L’analyse climatique montre que les variables clés pour expliquer l’apparition des pucerons sont le nombre de températures gélives pendant l’hiver et les températures moyennes de janvier à mars. Ces variables permettent de prédire l’arrivée des pucerons avec une erreur moyenne de 4.7 jours. Des notes d’informations seront diffusées pour présenter les simulations pour l’année 2019. Cependant, un véritable modèle de prédiction des épidémies de jaunisse ne sera pas disponible avant 2020.

 

Existe-t-il des solutions de biocontrôle pour lutter contre les pucerons ?

 

Aucun produit de biocontrôle n’est homologué à ce jour sur betterave, mais les essais se multiplient. L’ITB teste à nouveau cette année un certain nombre de produits pour lutter contre les pucerons et/ou la transmission de la jaunisse au champ. Des homologations de substances naturelles ou de microorganismes devraient vraisemblablement voir le jour à plus ou moins brève échéance, même si les conditions d’application (volume, multiplicité des passages) et le coût induit pourraient être des freins à leur adoption.

 

Existe-t-il des variétés résistantes à la jaunisse ?

 

En 2019, aucune variété résistante ou tolérante à la jaunisse ne sera disponible sur le marché. Cependant, des programmes de sélections sont en cours et trois variétés partiellement résistantes à la jaunisse ont été déposées en 1ère année d’inscription au Comité Technique Permanent de Sélection (CTPS). L’ITB teste également cette année au champ près d’une vingtaine de variétés potentiellement résistantes.

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Agrément conseil de l’ITB à l’utilisation des produits phytosanitaires n° 7500002.
Le portail EcophytoPIC recense les techniques alternatives à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.


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